La fatigue et le mauvais temps refroidissent visiblement les ardeurs des coureurs car personne ne bouge le petit doigt durant 10 kms. Le premier à mettre le nez à la fenêtre est Darwin Atapuma. Le colombien, 13e du général, veut surtout défendre son maillot à pois mais peut faire coup double s’il a les mêmes jambes de folie qu’en Andorre. Il est suivi de Rohregger et Gilbert, cependant Matthews accélère le rythme du peloton. Les Lotto Jumbo ne souhaitent visiblement pas voir Atapuma s’échapper sans Acedo mais l’australien est moins bon grimpeur et ne parvient pas à revenir. Lorsqu’il s’écarte, Barredo prend alors la chasse en main. Lui aussi finit par s’écarter alors que le trio de tête est toujours à une minute. Mais il est ensuite remplacé par Ion Izagirre qui, lui, fait exploser le peloton. Atapuma doit donc augmenter le rythme à l’avant, ce qui fait sauter Gilbert. Le bras de fer est engagé, Acedo est parfaitement calé dans la roue de son équipier basque, et Schleck est vigilant en troisième position. Lorsque le luxembourgeois se retourne à 4 kms, il ne feint pas sa surprise en ne voyant plus que Daniel Moreno dans sa roue ! Le reste du peloton préfère monter un peu moins vite. Le maillot rouge choisit pourtant de rester avec le duo Lotto Jumbo qui ne se pose pas de question. Izagirre accélère encore l’allure en apprenant par l’oreillette qu’Atapuma est mis en difficulté par Rohregger. L’autrichien passe en tête au sommet alors que le maillot à pois est cruellement repris dans le dernier km d’ascension. Il ne marque même aucun point pendant qu’Acedo se découvre enfin pour prendre les six points de la deuxième place ; il a refait la moitié de son retard. Ce groupe n’est qu’à une vingtaine de secondes de Rohregger mais les Lotto Jumbo ne souhaitent pas forcer plus, peut-être pour ne pas laisser Intxausti seul à l’arrière. Une centaine de coureurs se regroupent donc pendant que le coureur Trek porte son avance à deux minutes au pied du deuxième col.
Les pois toujours dans le viseur, Atapuma ne perd pas de temps pour repartir en solitaire. Le scénario se répète alors puisque Izagirre reprend le manche et morcelle de nouveau le peloton. Il était temps, mais le basque semble avoir des jambes pour la première fois de cette Vuelta car il cale son rythme sur celui d’Atapuma sans paraitre forcer. Pourtant les dégâts sont importants, y compris pour Rohregger qui a sans doute trop forcé dans la transition. Le voilà repris par Atapuma, et 30 secondes après par le groupe maillot rouge. Izagirre gère l’écart, commence à revenir dans la deuxième moitié du col, et réduit à néant la tentative d’Atapuma à moins de trois kms du sommet. Le colombien n’a plus la force d’accélérer pour les points, au contraire d’Acedo qui en prend 10 sans contestation : il passe donc virtuellement en tête du classement pour 4 unités ! Le peloton est alors réduit à une trentaine d’unités avec tous les favoris. Dans la descente, ce contingent double et Devenyns accélère sans réaction du peloton. Intxausti s’empare ensuite des deux secondes de bonifications restantes ; tout est bon à prendre. Et enfin quatre coureurs partent en contre : Samuel Sánchez, Simon Yates, Tschopp et Arredondo. En revanche Atapuma cherche à récupérer et ne suit pas le mouvement, ce qui arrange bien Acedo. Les Liquigas mènent désormais le peloton sans empêcher le retour d’attardés pendant que le quatuor revient sur Devenyns sans trop de problème. Ils comptent deux minutes d’avance au pied du troisième col, le plus raide (13 kms à 6,7%), dans lequel Tschopp fait belle impression. Samuel Sánchez est le seul à le relayer pendant que les autres subissent. Les deu anciens viennent d’abord à bout du jeune Yates, puis de Devenyns à moins de quatre kms du sommet. Enfin Arredondo lâche à un peu plus de deux kms, laissant le duo hispano-suisse s’envoler. Contrairement aux premiers cols, le peloton a quant à lui complètement laissé filer sous ‘’l’impulsion’’ des Liquigas. Ce sont les Movistar qui relancent l’allure dans les derniers kms d’ascension. Les ibères réduisent de suite le groupe à 48 unités, qui basculent avec 4’50’’ de retard. Il reste 45 kms de course.
Cependant tout n’est pas perdu pour le peloton les conditions météo ne pardonnent aucune débauche d’énergie inutile. Sánchez et Tschopp semblent déjà bien entamés, en tout cas plus que les Movistar qui réduisent fortement l’écart en bas de la dernière difficulté. Il n’y a cependant pas de gros dégât car le col est roulant, à 5,9% de moyenne ‘‘seulement’’. On recense tout de même un Atapuma à bout, qui n’aura donc pris aucun point de la montagne aujourd’hui et va rendre sur le fil son maillot à Acedo ! Les choses ne bougent finalement qu’à 4 kms du sommet. À l’avant, Samuel Sánchez se débarrasse de Tschopp sur un relais un peu plus appuyé. 2’30’’ plus tard, Majka pose la première banderille, à laquelle Barguil et Valverde répondent. Puis Brambilla et Poels les rejoignent alors que les premiers du général s’observent. Intxausti commence pourtant à reculer, alors Velits attaque à 2500 mètres du sommet. Froome le suit pendant qu’Acedo tente d’imposer le rythme pour son leader incapable de réagir. Quant à Roche et Schleck, ils s’épient toujours en chiens de faïence… L’irlandais s’est-t-il résigné ? Il n’a pourtant que 36 secondes à reprendre mais préfère mettre Pauriol à rouler. Schleck est tout aussi surpris que nous de cette attitude et décide finalement de tester son rival en accélérant. Pauriol veut le suivre mais se retourne et voit que Roche est dans le dur lui aussi ! Schleck fait alors l’effort pour rejoindre les hommes intercalés qui s’attaquent aussi. Majka tente de s’isoler, Brambilla et Poels sont repris et digérés par Froome puis Velits, alors que Sánchez bascule tout de même en tête au sommet. L’espagnol possède 40’’ d’avance sur Tschopp, 1’20’’ sur Majka, 1’40’’ sur Valverde, 1’55’’ sur Froome, 2’05’’ sur Velits, 2’17’’ sur Barguil, 2’30’’ sur Brambilla et Schleck, et 2’50’’ sur le groupe Roche-Intxausti-Taaramae composé de 21 coureurs. Les Lotto Soudal et Lotto Jumbo se mettent donc à la planche pour tenter de limiter la casse, mais l’écart se creuse. Devant des groupes se forment. À 10 kms du but, Sánchez possède désormais une minute sur 5 poursuivants dont Velits et Froome. Schleck, Brambilla et Barguil sont à une minute et le groupe Intxausti à 1’30’’. Au risque de tout perdre sur une énième chute, Schleck fait pourtant la descente et largue même l’italien et le français, bientôt repris par le peloton. Mais il ne pourra logiquement pas rejoindre les cinq hommes devant lui qui s’entendent bien. Velits et Valverde font ainsi la bonne opération du jour en doublant respectivement Izagirre et Taaramae au général. L’autre grosse performance du jour est à mettre au crédit de Samuel Sánchez, qui ne s’est pas écroulé et conserve suffisamment d’avance pour savourer sa victoire. La première de sa saison et une belle contrepartie après sa rapide désillusion au général.