Un petit bilan par équipe
L'Italie : 3ème cuillère de bois de suite. L'équipe est à l'image de ses provinces, capable de faire de bonnes actions mais pas de condition physique ni de conquête. Le déclin de Parisse est triste, mais compensé par l'émergence de Negri, Minozzi et Polledri qui a choisi l'Italie à l'Angleterre.
Galles : un bilan comptable positif pour une équipe à deux visages, Gatland a été contraint de s'adapter suite aux blessures en début de tournoi, et a démarré avec une équipe joueuse composée de joueurs des Scarlets. Mais quand ses joueurs favoris ont été remis sur pied, il n'a pas persisté ses essais prometteurs, pour revenir à ses fondamentaux, qui n'apportent pratiquement pas de résultats depuis le dernier Mondial. Une équipe frustrante, certains joueurs ont émergé comme Hill ou Dee, mais est-ce que les Shingler, Evans, Anscombe, Patchell auront un avenir international ou seront-ils simplement des bouche-trous ?
Ecosse : un tournoi en demi-teinte, ils sont transformés quand ils jouent à Murrayfield et deviennent "ordinaires" à l'extérieur, ce qui est très inquiétant. Comptablement, c'est la 2ème année de suite qu'ils gagnent 3 matchs, psychologiquement c'est important, ça faisait depuis plus de 20 ans que c'est pas arrivé. Leur pack et la profondeur de leur effectif ont souvent été un problème. Ils sont en train de régler ce problème. Leur pack est au niveau, il s'est rarement fait bolosser. Et j'ai l'impression qu'à chaque ligne, il y a une doublure valable.
La charnière semble pour moi poser problème. Laidlaw est un excellent buteur, fin gestionnaire, mais il a du mal à impulser un rythme élevé, comme a pu le faire Price en automne ou sur ses entrées. Laidlaw m'a en revanche plus plu dans son rôle de 10 de remplacement. Russell a été super irrégulier, il n'a fait qu'un seul bon match. Son départ au Racing sera quitte ou double ? Soit il fail comme l'a fait Sexton, soit il parvient à faire le tri dans son jeu avec une équipe pragmatique, et peut s'affirmer comme un grand 10.
Irlande : c'est l'équipe la mieux rodée, conquête excellente, intraitable dans le jeu au sol. Tactiquement, superbement bien emmené par leur charnière. C'est une machine qui asphyxie ses adversaires.
On pourra leur reprocher parfois un manque de flair, mais ils ont su rectifier le tir durant le tournoi, la venue de Ringrose apporte cette petite touche de créativité. La différence de niveau entre la charnière titulaire et remplaçante me parait être le point le plus inquiétant pour eux.
Je reviendrais plus tard sur les Anglais et Français, si je suis motivé
Quelques citations intéressantes
Rameur a écrit:Ce match, l'équipe de France ne le perd pas par manque de physique, ni par manque de technique, ni par absence de mental. Elle ne le perd pas sur la défense, ou sur la conquête, ou sur la discipline.
Ce match l'équipe de France le perd parce qu'elle est bête.
C'est quand même fou : tous les points inscrits par les Gallois sont venus de situations où la France n'était absolument pas en danger au départ. Comme en plus on saborde nos temps forts de façon idiote (touche non trouvée sur pénalité, ballon bêtement rendu au pied, passe en avant sans pression, insistance stérile sur des mauls alors que c'est le seul secteur où les gallois étaient fringants, etc.)...
Le pompon, c'est l'essai absolument débile qu'on prend. C'est au-dessus des capacités cognitives des joueurs de lire les règles et de les comprendre ? (1. le renvoi est valable, s'il fait 10m, même si le ballon roule par terre, 2. on ne s'arrête pas de jouer en levant les bras en demandant à l'arbitre de siffler une faute imaginaire...)
Rameur a écrit:Bon, je vais essayer d'apporter un peu de nuances.
François Trinh-Duc est vraiment l'archétype du "joueur d'instinct", parfois jusqu'à la caricature.
Dans le feu de l'action, il est superbe : quand il s'agit de choisir en une fraction de seconde la bonne trajectoire de course, la bonne option de passe, d'instinct, il est capable de prendre la bonne décision (sur l'essai de Gaël Fickou, tout est correct : la trajectoire de course, le timing de passe, etc.)
Mais dès qu'il a le temps de réfléchir, dès que son esprit est tiraillé entre son instinct de joueur et son devoir de direction, il y a toujours un risque qu'il gamberge et qu'il fasse fausse route.
J'ai par exemple rarement vu un joueur avec un taux de réussite aussi élevé quand il s'agit de taper des drops (on est en plein dans l'adaptation à une situation de jeu de mouvement) et aussi friable sur coup de pied placé (où à l'inverse, le buteur a tout son temps pour se préparer). C'est aussi fou d'être capable de délivrer des coups de pieds de déplacement judicieux au coeur du jeu, et de rater une ligne de touche quand le jeu est arrêté.
C'est à mon avis une question de caractère. Il ne sert probablement à rien d'espérer qu'il se refasse sur ce point (ce n'est pas comme changer une technique, c'est autrement plus profond et plus ancré dans l'identité du joueur).
Il faut donc faire avec en lui associant des joueurs à même de corriger cette carence (ses meilleurs matchs en équipe de France ont souvent été réalisés avec des demi-de-mêlée au profil plus cérébral et lucide comme Dimitri Yachvili ou Morgan Parra; son association avec Anthony Belleau à Toulon a l'air de bien marcher aussi) ou se passer de lui.
Dans l'état actuel de l'équipe de France, il apporte quand même des choses intéressantes. Pour l'instant, le point fort de l'équipe de France est sa défense, et à sa position stratégique d'ouvreur, sa solidité au placage, et sa faculté à lire le jeu quand il se déroule à haute intensité n'est pas étrangère aux bonnes performances défensives de l'équipe.
Comme en plus l'équipe de France est en souffrance sur sa conquête et qu'elle joue par à-coup avec peu de bons ballons à jouer (les quelques bonnes munitions quand tout se passe bien en touche ou quand l'équipe se décide enfin à jouer les mêlées, ou sur les ballons de récupération), sa faculté à faire les bons choix sur ces quelques bonnes munitions est précieuse.
Après, sur des matchs comme hier, où l'équipe domine en possession et en occupation et où tout le monde se dit "c'est bon on domine, ça va passer, faut surtout pas paniquer et bien rester structurés", ce n'est probablement pas le joueur idoine. Il n'est intéressant que si le jeu prend de l'ampleur, et que l'équipe accepte de prendre des risques (j'ai d'ailleurs commencé à m'inquiéter quand l'équipe s'est mise à jouer ouvertement l'occupation).