Après une année 2017 avec des hauts et des bas, j’avais besoin d’un nouveau Challenge cette année. Bien motivé par les perfs des autres Gruppettistes, je décide de me lancer dans les Monuments, avec la Doyenne pour commencer !
Je m’inscris début février, et à partir de là, je ne penserais qu’à ça sur le vélo. Ma préparation est excellente, mais quelques pépins de santé viennent me perturber durant la semaine décisive. Allergie, fièvre, je pense un moment que ça ne passerait pas, mais ça va mieux à partir de jeudi, je me lance, j’ai prévenu Tilo de ma venue depuis 2 mois, je peux pas mettre de lapin.
Après avoir été très bien accueilli par Tilo et un réveil qui pique, nous sommes sur la ligne de départ avec Tilo. Je suis pas à l’aise en peloton, je recule souvent, me fais enfermer, laisse des trous. Tilo prend le large dès la première cote. Je décide de pas faire d’efforts superflus et je reste dans le paquet. Peu de plat, mais les montées sont très roulantes, ça passe tranquille dans les roues. Peu avant le 1er ravito (km 43), mon Garmin freeze. J’appuie et j’enfonce chaque touche, mais rien à faire. Je serais sans repères durant plus de 230km.
Arrêt ravito, je repars direction Bastogne. Je suis un peu perdu pendant une dizaine de minutes, en chasse patates, en attente d’un bon groupe, pas trop fort, pas trop lent. Je le trouve finalement, et on file rapidement au pied de la première difficulté du jour, la Côte de Bonnerue. 2500m à 6%, je la fais tout à gauche, à l’aise. J’arrive à Bastogne sans encombre, mais la chaleur se fait sentir.
Après la pause à Bastogne, je repars avec un groupe bon groupe d’Allemands, mais je lâche en descente et me retrouve avec une quinzaine de suceur de roues dans la descente qui mène vers le Mur de Saint-Roch. Je demande le relais mais rien ne vient. Dès le pied, ils me doublent tous, les gars partent au sprint, je comprends pas le délire. Ils se pètent tous le caisson sur la partie à 20% et je les reprends un par un, façon Perichon. Saint-Roch, c’est impressionnant visuellement ! Au sommet, je rejoins un groupe d’une dizaine de Gallois, et on va direction Gouvy pour le 3ème ravito.
Les jambes commencent à être un peu lourdes. A la reprise, j’accroche un gros groupe (50), petite allure jusqu’au Mont-le-Soie. Je suis le premier lâché sur les premières pentes, je n’arrive pas à trouver mon rythme. J’en redoublerais une bonne vingtaine, mais ça va pas fort. J’essaie de gérer mais j’ai pas l’impression de contrôler grand-chose. Je finis par me laisser tracter au rythme d’un Néerlandais de 90kg jusqu’au sommet. Les visages commencent à être marqués…
La transition jusqu’à la Côte de Pont est délicate, je suis largué sur les faux-plats, sans force. Je trouve un Irlandais courageux avec qui faire l’effort jusqu’au pied. Pont c’est une saloperie sur les chiffres, mais ça passe quand même pas trop mal vu qu’on arrive à pleine vitesse au pied. J’ai l’impression de pas avancer mais j’en remonte pas mal, ça me redonne du moral. La Côte de Bellevaux arrive rapidement après Pont, pas une difficulté de fou, mais bien exposé au soleil, ça tape fort. Je choisis d’y aller tranquille avant de rejoindre le ravito de Malmedy.
Pause, je fais part de mes malheurs au Gruppetto. Je m’arrête un grosse dizaine de minutes et je repars. La ferme de Libert arrive. C’est pour moi la pire saloperie de ce parcours, plus dur que la Roche ou la Redoute. C’est du 14/15%. Un moment j’arrive là, je vois un replat et me dis, c’est fini. ( https://www.google.fr/maps/@50.446177,6 ... 312!8i6656 )
Bah non, une fois que j’arrive dans le replat, je vois ce putzain de mur devant moi ( https://www.google.fr/maps/@50.4464135, ... 312!8i6656 ). Obligé de laisser pas mal de plumes ici, mais je vois que je suis pas trop mal dans les murs. La transition vers le Rosier est horrible par contre, avec plusieurs côtes non répertoriés qui me cassent les jambes et surtout le moral.
Le Rosier est la plus longue difficulté du parcours. Je suis asphyxié et comme sur Mont-le-Soie, j’ai envie de gérer mais je fais que survivre, rien de plus. J’ai mal à la tête, comme si je recevais des coups de marteau piqueur à chaque coup de pédale. Au sommet, je vois un paquet de coureurs allongés par terre, au bout de leur vie. C’est là que je découvre que le cyclisme, c’est un truc de sado-maso. Faut vouloir se faire mal comme ça, et plus la course avançait, plus je prenais un grand plaisir à voir tous ses gens en PLS, ça me donnait de la force.
Après le Rosier, le Maquisard. Mêmes sensations que sur le Rosier, je me dis que je vais pas y arriver, si je bute sur la côte la plus simple.
La transition pour la Redoute est affreuse. Des faux-plats à perte de vue. Ça me fait chier. J’ai peur de la Redoute. Quand je vois le panneau « Start », je décide d’y aller pour le chrono, voir ce que ça donne. A ma surprise, je vais pas trop mal, et plus j’accélère, mieux je me sens bizarrement. Je double un paquet de monde, je revois toutes les images de mon adolescence. Je me sens acteur de mon propre film, et ça me transcende.
Au sommet, je suis euphorique, je fais le faux-plat assez rapidement et rejoins Sprimont pour le ravito. Encore plus de gens en PLS, ça me donne de la force. Je repars. J’ai l’impression de planer. Je rattrape tout le monde, je sens plus mes jambes. Ils sont 15 à serrer les dents derrière moi, le petit puncheur. Je fonce et au pied de la Roche, ils ne sont plus que 2. Je fais la Roche à bloc et me mets minable. Elle est dure, mais régulière, ça passe bien.
J’étais un peu trop euphorique, et j’explose un peu dans la remontée qui suit. Mais je me dis, c’est fini après ça, c’est roulant avant St-Nicolas. Perdu, on doit se taper un changement de parcours, redescendre et refaire une bosse gratuitement. Je dis à un gars « c’est vraiment des enculés » . Ce nombre de bosses non répertoriés qui m’ont pris par surprise, c’est fou. Je me refais quand même la cerise avant St-Nicolas, où je lâche absolument tout !
C’est la délivrance. Ensuite c’est un peu moche. Y a la côte d’Ans, immonde, mais je m’amuse à faire quelques accélérations avec un Australien, qui me vaincra au sommet. Il reste encore 8kms pour finir, pas les plus beaux. Je dois les faire à 20 à l’heure, mais je m’en fous, j’ai pu faire la Doyenne des classiques, une des plus difficiles au monde.
Je me suis dit une dizaine de fois que j’allais abandonner, j’ai tellement souffert mais au final, le bonheur de terminer l’emporte largement. Ça me donne envie d’en refaire ! Le Tour des Flandres sera certainement ma prochaine étape, avec peut-être le Tour de Lombardie ou l’Amstel, même si c’est pas un Monument. Paris-Roubaix, c’est un autre sport et Milan San-Remo ne me tente pas du tout.
Et pour finir, je remercie encore Tilo pour son accueil.