Alors, la version courte : je finis en 10h pile, à la 140e place sur 640. Super résultat pour moi sur cette distance, à tempérer par le fait que le niveau global m'avait l'air assez peu élevé (rien à voir avec le championnat de France de trail!).
La version "un peu" plus longue maintenant. Le réveil à 2h du mat' ça fait mal, mais pour choper la navette à 3h15 (pour aller de l'arrivée au départ, le parcours n'est pas en boucle), il n'y avait pas trop le choix (d'ailleurs pour faire écho à la discussion d'un autre thread, c'est beaucoup trop tôt pour faire la grosse commission, mais j'avais bien prévu un paquet de mouchoirs, donc pas de souci sur le parcours
). Départ à 5h30 après un show laser sympa sur la façade la mairie de La Mure, il fait déjà assez clair pour que la frontale obligatoire ne serve à rien. Il y a vraiment beaucoup de monde, presque 700 au départ. D'ailleurs au bout de peu de temps on se retrouve complètement bloqué pendant 5 bonnes minutes dans un single pentu. Tout le monde se demande ce qui se passe, est-ce qu'il y a eu un accident devant? En fait non, apparemment le parcours prévoyait de grimper dans une petite faille, sauf que ça prenait bien trop de temps aux gens, donc les organisateurs finissent par nous dévier sur un chemin plus simple.
On nous avait annoncé grand beau au moins jusqu'au milieu d'après-midi, avant de possibles orages. Sauf qu'à 8h le ciel se bouche, les sommets alentours deviennent tout noirs, ça commence à souffler et tonner... et bientôt à pleuvoir
. A ce moment-là je suis un peu au fond du trou mentalement. J'étais parti dans l'idée de faire une belle balade, je suis pas prêt pour une galère dans le vent et la boue... En plus au bout de quelques km je commence à avoir bien mal à un tendon d'achille, ce qui est incompréhensible (j'ai eu ce souci l'année dernière pendant des mois, mais je m'en étais débarrassé au cours de l'hiver, et ce n'est pas mon départ bien tranquille sur les 3 premières heures qui aurait du déclencher ça), il y a toujours bien trop de concurrents partout, et j'ai faim de manière quasi-continue (alors que je m'alimente plus que d'habitude, et que je n'ai normalement pas faim en course avant au moins 7 ou 8h d'effort
). Bref, les 3 premières bosses se passent à allure prudente, avec très peu de plaisir, et bien que les jambes soient bonnes je me demande si cela vaut la peine d'aller au bout.
Mais là miracle! Vers 9h la pluie cesse, le ciel se met à s'éclaircir rapidement... A peine 30 minutes plus tard, on a bien le grand beau prévu. Mon moral remonte en flèche, et ça tombe bien parce qu'on est au pied de la principale difficulté du parcours : 1200m de D+ quasiment sans répit, avec pas mal de passages à plus de 30%, pour atteindre le sommet du Sénépy. Alors moi ça me fait pas trop peur ce genre de trucs, mon entrainement "de base" du weekend c'est une montée assez similaire, donc je me cale à un bon rythme, et je regarde le D+ défiler à la montre. Mais alors c'est dans cette montée que je me rends vraiment compte que contrairement à ce dont j'ai l'habitude sur les courses, la grande majorité des participants n'est pas du coin (avant et pendant la course j'ai discuté avec un breton, un parisien et un rémois), et vient d'endroits peu montagneux où ils ne peuvent pas se faire plus de quelques centaines de mètres de D+ avant de devoir redescendre. Du coup je ramasse un grand nombre de gars collés au sentier, donc moral++, et ça permet de mettre de côté le tendon d'achille qui apprécie très peu ces montées raides.
Le Sénépy est une montagne à vaches au sommet complètement découvert. On y a droit à une superbe vue à 360°, qui est une belle récompense pour les efforts réalisés.
Derrière on a à nouveau droit à 1200m de dénivelé d'une traite, mais en descente cette fois-ci. Là c'est mon terrain de jeu favori, surtout que les sentiers de cette course sont vraiment très peu techniques, donc ça permet d'envoyer. Il y a juste deux soucis : 1) les non-montagnards ont encore plus de mal avec les longues descentes que les longues montées, et ont tendance à pratiquement s'arrêter dès qu'il y a quelques cailloux sur le chemin
et 2) les 25 derniers km sont communs avec le parcours du 40 km, sur lequel il y a encore plus de monde, et qui est parti bien en retard par rapport à l'horaire prévu à cause de l'orage. Du coup il y a du monde partout qui n'avance pas, il faut descendre à deux à l'heure dans les passages trop étroits pour doubler, et je passe mon temps sur la partie "sale" des sentiers lorsque c'est un peu plus large. Mais doubler plein de monde c'est aussi assez grisant, alors le moral reste bon.
On en arrive aux passerelles éponymes du trail, au-dessus du grand lac bleu-vert de Monteynard.
C'est beau, c'est marrant quand la passerelle balance un peu, mais vaut mieux pas trop regarder en bas quand même. Par contre il commence à faire très chaud (sur la route du Tour de France.. ah non), et il reste encore un bon 800m de D+ à faire, répartis sur 3 ascensions à basse altitude, entre 500m et 800m. Aux ravitaillements des bénévoles avec des bouteilles d'eau froide arrosent la tête et la nuque des concurrents, ça fait un bien fou. J'ai aussi une flasque réservée à de l'eau plate pour faire la même chose entre les ravitos. Malgré cela et une bonne hydratation je suis bien obligé de ralentir le rythme, sous peine de grosse surchauffe. Je souffre bien mais je gère, je ne me suis pas fait doubler depuis bien 30 km et je n'ai pas l'intention que ça change
. Dans les montées des coureurs se garent à l'ombre un peu partout, les participants du 40 en particulier semblent avoir beaucoup de mal.
Finalement au détour d'un sentier une bénévole m'annonce que ça y est, il n'y a plus que de la descente, mais de faire attention car c'est technique (ouais bon en fait c'était juste bien raide et étroit par endroit). J'en suis à 9h45 de course, il me reste normalement un peu plus de 3 km à faire... du coup je pars à fond pour aller accrocher les 10h. J'ai doublé assez de monde pour être un peu moins embêté sur cette fin de parcours, mais je dois quand même demander à quelques gars de s'écarter. Je vais de plus en plus vite, un bénévole annonce 1 km restant, je dépose quelques gars qui trottinent difficilement alors que je dois être à 15 km/h, et hop, ligne d'arrivée, 10h tout pile!
La redescente sur terre n'est pas très facile. La chaleur m'avait bien bloqué l'appétit, mais 20 minutes après l'arrivée je commence à avoir extrêmement faim, tout en n'ayant pas très envie de manger. Une fois refroidi un peu, le tendon d'achille est vraiment douloureux, et là aujourd'hui ça me gêne pas mal même pour marcher. Je me sens aussi complètement claqué, je dois faire une sieste au bord du lac (pendant que l'organisation projette le début du match sur un grand écran) avant de pouvoir reprendre la route.
Au final j'ai l'impression que j'ai tourné énormément au mental sur cette course, bien plus que d'habitude. Ça m'a permis de mettre de côté certains signaux physiques négatifs, mais ça implique aussi que j'ai poussé fort la machine et que le contre-coup est important (d'ailleurs je me sentais pas en état d'aller bosser aujourd'hui, du coup j'ai le temps pour écrire ce long CR
). Mentalement je me sens un peu à plat aussi, en septembre je suis inscrit sur un 85km et je n'ai vraiment aucune envie d'y penser pour le moment. Je pense que sur mes prochaines courses il vaudrait mieux que je force moins, ça me semble un meilleure idée pour le long terme. Le souci que j'ai eu cette saison est que je gère un peu trop bien mon effort, je suis prudent au départ alors que je trouve que quasi tout le monde part trop vite en trail (hier j'étais seulement 270e au bout de 3h de course). Mais une fois que je commence à doubler, je me laisse facilement griser, surtout en descente, et je me retrouve à taper plus fort dans la machine que ce dont j'avais l'intention.