Classic de l'Ardèche : Romain Bardet s'impose en solitaire
D'où sa joie, communicative dans l'équipe AG2R La Mondiale et auprès du public, d'avoir levé les bras pour sa rentrée, trois semaines après s'être entaillé l'avant-bras gauche et sectionné un nerf, un accident domestique. D'où ses mots : «Ici, c'est le vélo d'attaque, j'ai pris beaucoup de plaisir à courir sans arrière-pensée. J'en fais peu mais j'aime ces courses de classe 1 où on court différemment. C'est agréable de courir en France, c'est la seule course où je viens en voiture de la maison. Quand j'ai attaqué dans les coteaux du Cornas (à 24 kilomètres de l'arrivée, sur une montée de 6 bornes), je ne me suis pas posé de questions, je savais que cette bosse correspond à mes caractéristiques, il fallait que je fasse des efforts (pour sa rentrée). Et puis c'était à moi de provoquer, de faire travailler les autres équipes sur les routes tortueuses, pour que tout le monde ait sa chance chez nous.»
Son entraîneur, Jean-Baptiste Quiclet, qui avait endossé le rôle de directeur sportif, détaille : «En plus de se tester, Romain a attaqué pour que cela serve à Alexis (Vuillermoz), qui est en forme, à Pierre (Latour), qui était chez lui. On pensait à un regroupement au sommet, avec pour nous l'avantage du surnombre, mais il creusait, il creusait (20 secondes en haut, 50 secondes après la descente). À la fin, le fait qu'il n'ait pas perdu de temps sur le plat quand Bob Jungels s'est mis à rouler, va le rassurer sur son travail hivernal.»
«J'ai pas mal douté quand je me suis blessé»
Bardet ne s'attendait pas à ce dénouement radieux sur plus de 3 000 mètres de dénivelé, au milieu des vignes nues de l'Ardèche. «Sans mentir, je ne savais pas où j'en étais physiquement », affirme-t-il. J'ai pas mal douté quand je me suis blessé, à ne pas faire grand-chose pendant plus de dix jours.» Cependant, il avoue, une fois son attelle définitivement retirée, avoir «beaucoup travaillé cette semaine dans le but de simuler la course par étapes (Tour d'Andalousie) que j'ai manquée à cause de ma blessure » Cette fois, Bardet avait le couteau entre les dents. Il a mis beaucoup de puissance dans son démarrage. Groupama-FDJ (Gaudu, Vichot, Reichenbach) n'a rien pu faire. Sicard a essayé de contrer, en vain. Barguil était en retrait (12e à 1'18'').
«Je pense que j'avais les jambes pour y aller mais pour une fois j'avais décidé de ne pas me dévoiler trop tôt (comme l'an dernier, où il avait été repris) afin de jouer mon va-tout dans la dernière bosse (côte du Val d'Enfer), raconte Lilian Calmejane. Sans regrets, car c'était un super Romain. Sur le plat, vent dans le dos, il a fait un numéro et nous on jouait la 2e place (il a fini 3e).» En retournant vers le bus d'AG2R La Mondiale, Bardet aperçut Nans Peters et fit un détour pour l'embrasser. Lui et Hubert Dupont avaient bouché dix minutes sur un groupe de cinq échappés. Sans leur dévouement, pas de victoire du champion.