Écrit le par dans la catégorie Analyses, Coup de bordure.

Ces dernières années, le cyclisme asiatique connaît un essor incroyable. Entre organisations de courses de plus en plus professionnelles, équipes de mieux en mieux structurées et coureurs de renoms qui viennent y exercer leur talent, l’Asie apparaît comme le nouvel Eldorado. Petit tour d’horizon du mercato 2018.

Seconde chance

Ils sont de plus en plus nombreux à venir tenter leur chance en Asie depuis l’Europe. Une carrière difficile sur le vieux continent, ponctuée de quelques passages à vide, et on se retrouve vite à pied. Il existe désormais une nouvelle voie : celle de l’Asie. Et ce n’est pas (ou plus) une voie de garage. Cet hiver, un certain nombre de coureurs a fait le chemin retour : rentrer d’Asie auréolé de lauriers. Un exil gagnant.

Ainsi, plusieurs Espagnols sont rentrés au pays. Jon Aberasturi qui a aligné les succès chez Ukyo rejoint l’équipe Continental Pro Euskadi Basque Country – Murias. Promotion similaire pour son équipier australien Nathan Earle, qui signe chez Israël Cycling Academy. Les Espagnols sont plusieurs à avoir brillé au pays du soleil levant. Si Aberasturi s’en sort le mieux, son équipier Egoitz Fernandez, et leur rival Ricardo Garcia (ex-Kinan) rejoignent le nouveau projet du Team Euskadi, en division continentale. Signalons aussi le retour du Grec Polychronis Tzortzakis, qui signe chez les belges de Tarteletto.

Des pertes pour le plateau Asia Tour bien vite compensées. Ils sont en effet plusieurs à venir tenter leur chance. L’équipe Ukyo, qui a le plus perdu, récupère le sprinteur néerlandais Raymond Kreder, ancien vainqueur d’étape sur le Tour de Norvège ou sur le Tour de l’Ain notamment.

D’autres coureurs ont eux préféré la Malaisie. Ainsi le jeune grimpeur érythréen Metkel Eyob rejoint Terengganu,à l’image du russe Artem Ovechkin. En tant que bon baroudeur, ce dernier trouvera en Asie un terrain de jeu intéressant, avec des schémas plus débridés qu’en Europe. A noter également les signatures du sprinteur suisse Dylan Page chez Sapura, et de l’Américain Alexey Vermeulen, ex LottoNL – Jumbo, chez Interpro. 

Enfin, avec un palmarès moins garni, plusieurs coureurs viennent tenter leur chance sur le continent ,tels le sprinteur hongrois Zsolt Der (Beijing XDS), le grimpeur espagnol Gabriel Reguero (VIB Bikes), le polyvalent letton Andris Vosekalns (Hengxiang) ou encore le jeune basque Jokin Extabe (Interpro).

 

Les habitués du circuit

Le Français Damien Monier, un habitué des équipes asiatiques.

Si certains coureurs font la navette avec l’Europe, d’autres sont des fidèles du circuit asiatique. Parfait exemple avec Marc de Maar. Le Néerlandais quitte la Chine, et l’équipe Hengxiang, pour rejoindre le Team Ukyo au Japon.

Au rayon transferts marquants, citons Damien Monier. Le Français évoluait depuis 2013 chez Bridgestone – Anchor. Après cinq ans de bons et loyaux services, il quitte sa formation pour rejoindre Aisan. Même profil pour Salvador Guardiola, qui après trois saisons et demi chez Ukyo rejoint Kinan. Au Japon toujours, signalons l’arrivée du Britannique Daniel Whitehouse chez Interpro – Stradalli. Il quitte ainsi le Sud-Est Asiatique où il a brillé dès que la route s’élevait. Il sera très intéressant de le suivre au Japon. Autre mouvement important, l’allemand Mario Vogt quitte Gusto pour Sapura.

De nombreux océaniens évoluent également en Asie. Parmi ceux qui franchissent le pas, citons Robbie Hucker. Il a déjà brillé en Asie, sous les couleurs d’Avanti/IsoWhey, mais il évoluera cette fois-ci dans une formation asiatique, en l’occurrence le Team Ukyo. Aller-retour du côté de la formation malaisienne Sapura : le kiwi Jason Christie est libéré, remplacé par Jesse Ewart qui évoluait chez 7-Eleven (Philippines). Bon choix ? Pas sûr, Christie ayant remporté le titre national cette année… mais Ewart grimpe bien, et ne compte pas ses coups de pédales.

Du côté des « locaux », le grimpeur chinois Nazarbieke Bieken rejoint la réserve de Mitchelton, qui bat toujours pavillon chinois. Retour en Asie aussi pour Cheung King Lok. Bien que pensionnaire d’Orica l’an passé, il n’en a jamais porté les couleurs, restant avec l’équipe nationale de Hong Kong. Il réintègre cette année l’effectif du HKSI.

Au Japon, Sho Hatsuyama quitte Bridgestone pour tenter sa chance en Europe, chez Nippo. Il est remplacé par Kazushige Kuboki qui fait le chemin inverse.

Même échange au Kazakhstan avec Vino – Astana Motors. Le talentueux Yevgeniy Gidich rejoint Astana, en retour l’équipe récupère Arman Kamyshev, qui malgré quelques résultats corrects (Top 20 à Hambourg, à Plouay, à Fourmies, et sur quelques semi-classiques italiennes n’a jamais vraiment convaincu.

Du mouvement également en Malaisie. Sapura récupère Muhamad Adiq Othman, l’un des sprinteurs de Terengganu. Pour le remplacer, Irwandie Lakasek et Muhamad Afiq Othman viennent renforcer l’effectif construit autour de Mohamed Harrif Salleh.

 

Nouveaux projets et retours

Après un passage raté chez Orica, Cheung King Lok est de retour sur le circuit asiatique.

  • Nouvelle année, nouveaux projets ! Commençons par deux projets « nationaux ». Le premier en Ouzbékistan. La patrie de Djamolidine Abdoujaparov, Rafael Nuritdinov ou encore Sergey Lagutin reprend du poil de la bête. Elle lance le Tashkent Cycling Team, projet fédéral ayant pour but de faire éclore de jeunes talents locaux. L’équipe est ainsi composée de huit jeunes coureurs (nés entre 1995 et 1998), dont le plus connu est certainement Dilmurdjon Siddikov, passé chez Unieuro Trevigiani l’an passé. En Asie centrale toujours, le Project Nice Côte d’Azur. Sous ce nom respirant plutôt le soleil, la Méditerranée et la pissaladière, se cache bel et un bien un projet… mongol. Six jeunes coureurs (de 1995 à 1999) rejoignent Nice pour se former, en partenariat avec la fédération mongole.

 

  • Direction la Corée du Sud avec la nouvelle formation Uijeongbu, qui a réalisé un beau recrutement. Elle récupère Gong Hyo Suk (2ème Langkawi 2010, 3ème du Tour de Corée 2016) qui était parti chez Terengganu. Autres cadres, Lee Ki Suk et Jung Ji Min pourront encadrer les deux jeunes espoirs coréens, Jung Ha Jeon et Jung Woo Ho. Indubitablement une belle formation à suivre en Corée.

 

  • Quelques milliers de kilomètres plus au Sud, de nouveaux projets éclosent en Malaisie, avec une formation centrée autour du sprinteur Anuar Manan. Elle portera le nom de Forca – Amskins Racing, et développe de grosses ambitions. Manan amène avec lui Mohammad Mat Senan, autre ancien sprinteur de Terengganu en perte de vitesse. Côté grimpeurs, on comptera plutôt sur le voyageur danois John Kronborg Ebsen, qui arrive d’Infinite-AIS, ou sur le colombien Alvaro Duarte, déjà passé par RTS avant de rentrer au pays. D’autres solides Malaisiens seront de la partie, comme Amir Rusli, Nik Zulkifle et Sofian Mohammed Bakri.

 

  • A côté de la Malaisie, l’Indonésie. Le retour du Tour of Indonesia en catégorie professionnelle a décidé plusieurs formations locales, habituées du circuit, à franchir le pas de l’inscription UCI. Advan Customs par exemple possède quelques jeunes talentueux (Muhammad Barokah, 20 ans, Yuda Muhammad, 21 ans), qui incarnent le futur du cyclisme indonésien. PGN Road est, quant à elle, déjà habituée aux avant-postes sur le circuit asiatique. On retrouve en son sein quelques figures du cyclisme local, comme Dadi Suryadi, de retour de Malaisie, ou encore Robin Manulang et Jamalidin Novardianto, qui espérera enfin décrocher un bouquet sur une épreuve internationale après déjà quatre deuxième places ces dernières saisons (une par année depuis 2014).

 

  • En Asie Centrale, une nouvelle équipe kazakhe voit le jour, Apple Team. Avec Yevgeniy Yakovlev à sa tête, l’équipe basée à Almaty a de belles ambitions sportives. Elle regroupe plusieurs bons coureurs, rapatriés de divers pays : Ilya Davidenok revient d’Iran, Vadim Galeyev et Artur Fedosseyev de Taiwan, et Maxat Ayazbayev de Chine. Belle prise de guerre en provenance de l’équipe « voisine » Vino, en la personne de Dmitriy Lukyanov. Enfin on retrouve quelques figures qui avaient un peu disparu des radars, avec Pavel Gatskiy ou Oleg Zemlyakov. De quoi composer un effectif très solide pour cette première année d’existence.

 

  • Quelques nouveautés en Iran également. Tout d’abord, quatre nouvelles formations, sans doute motivées par la présence du Tour of Iran au calendrier international, s’inscrivent auprès de l’UCI : DFT Team, Gun Ay Tabriz Team, Mes Kerman (de retour après une absence longue de six ans sur le circuit UCI) et Omidnia Mashhad Team. Elles ne présentent pas de coureurs connus sur le plan international, à l’exception de deux coureurs de DFT : Ali Nemati et Mohammad Gharehbaghi. Le premier, passé un temps chez Tabriz Petrochemical, évoluait en Chine chez Hy Sport l’an passé où il a montré quelques dispositions lorsque la route s’élève. Parcours à peu près similaire pour Mohammad Gharehbaghi, qui après des débuts au pays est parti en Chine, lui aussi chez Hy Sport où il a vécu une belle saison 2016 avec une 8ème place sur le Tour du Hainan, avant de revenir équipier chez Tabriz Shahrdari l’an passé. DFT a aussi recruté un australien, Travis Parkley-Simpson, sans référence internationale. En revanche, une véritable révolution de palais s’est opérée dans les deux grosses équipes iraniennes : Pishgaman et Tabriz Shahrdari. La quasi-totalité des coureurs de pointe sont libérés ! Shahrdari conserve quelques figures locales (Ghader Mizbani, Khalil Khorshid, Saeid Safarzadeh, et Hamid Pour Hashemi), mais sinon place aux jeunes. Les différentes affaires de dopage qui ont émaillé le cyclisme professionnel iranien y sont-elles étrangères ? Rien n’est moins sûr. L’an dernier Pishgaman avait dû subir une suspension d’un mois suite au contrôle de Rahim Emami, consécutif à celui de Naser Rezavi. Place à la nouvelle génération donc pour ces deux formations. A suivre !

 

  • Au rayon des retours, signalons celui du Team Sharjah. L’équipe émiratie revient auprès de l’UCI, sans doute attirée par la présence de son épreuve « nationale », le Sharjah Tour, en catégorie professionnelle. L’effectif est de qualité, avec les Marocains Abelouache et Lahsaini, l’Ukrainien Golovash et les Algériens Abderrahmane et Oussama Mansouri.

 

  • Enfin Nex – CNN est de retour dans le circuit professionnel. L’équipe laossienne, qui a battu autrefois pavillon du Bruneï, revient avec un effectif toujours cosmopolite. On y retrouve toujours le « vieux » Néerlandais Lex Nederlof (qui va sur ses 52 ans), mais aussi quelques coureurs plus intéressants sportivement comme le Kiwi Logan Griffin, deuxième de la NZ Cycling Classic en 2017. On peut y ajouter le Thaïlandais Kritsada Changpad, qui arrive d’Infinite-AIS avec une 5ème place sur son tour national à la clef en 2017 ; ainsi qu’un beau duo d’indonésien : Hari Fitrianto, fidèle de l’équipe, et Ryan Hillmant Ariehaan, 4ème du dernier Tour de Selangor (Malaisie).

 

Thomas Bruno

Crédit Photo : Jelajah Malaysia, Løken & Petro via Wikimédia Commons
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Modérateur: Animateurs cyclisme pro

Re: Retour sur le mercato asiatique

Messagepar Guame » 24 Mar 2018, 16:30

Toujours sympa Vino d'en savoir plus sur des sujets que tout le monde ne maîtrise pas sur le bout des doigts. :mrgreen:
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