Écrit le par dans la catégorie Histoire, Les forçats de la route.

En cette période de reprise de la saison en Europe, et plus particulièrement en Belgique, un certain barème sera appliqué pour faire ressortir les meilleurs flandriens. Seront combinés les résultats des courses depuis que la compétition cycliste existe, c’est-à-dire la fin du XIXème siècle. Le barème choisi ici a été relativement simple, afin de ne pas compliquer la tâche du rassemblement des épreuves, et s’est voulu objectif, avec pour seuls choix arbitraires de quantifier le niveau des courses selon leur statut à différentes époques. Il y aura donc beaucoup de coureurs inconnus du grand public dans les premiers cités ; ce sera l’occasion de visiter (ou de revisiter) l’histoire du cyclisme.

Paris-Roubaix et le Tour des Flandres voient leur top 10 marquer 8-6-4-3-2-1-1-1-1-1 points. Derrière, cela a été réparti en 4 catégories, avec 5-3-2-1-1 pour les 5 premiers de la première, 3-2-1 pour le podium de la seconde, puis 2 et 1 points aux vainqueurs des deux catégories restantes. La catégorie principale a été prise pour Gent-Wevelgem, le circuit du Het Volk/Het Nieuwsblad, Paris-Bruxelles (jusqu’à sa première annulation en 1966) et pour Harelbeke (depuis sa promotion World Tour en 2012). Pour les autres sans rentrer dans le détail sont inclus des courses plus anciennes, certaines ayant disparues il y a bien longtemps, afin d’essayer de trouver une forme d’équité entre les époques.

20ème : Freddy Maertens, 62 points

Double champion du monde, vainqueur d’une Vuelta dont il a remporté 13 des 21 étapes, triple maillot vert du Tour de France avec un cumul de 15 étapes, le palmarès de Freddy Maertens est impressionnant, malgré les années de galères, entre dettes, dépression et alcoolisme. Dans les Flandres, on peut y lire Gent-Wevelgem, le Het Volk, le Scheldeprijs, le championnat des Flandres, le GP E3, Paris-Bruxelles et bien d’autres, dont certaines plusieurs fois (et ailleurs, on y trouve Paris-Tours, l’Amstel Gold Race ou Zurich, si on ne se contente que des classiques), mais il n’aura jamais remporté Paris-Roubaix, ni le Tour des Flandres. Mais il reste unanimement reconnu comme « vainqueur moral » du Ronde 1977, disqualifié pour un changement de vélo illicite dans le Koppenberg, mais sans qu’on lui demande d’arrêter la course. Il a ainsi collaboré avec Roger De Vlaeminck, pourtant dans une autre équipe, roulant même plus que lui, afin que les deux résistent au retour du peloton jusqu’aux rues de Meerbeke, où il lui laisse la victoire dans un simulacre de sprint, Freddy Maertens se sachant hors-course. Par la suite, les déclarations sur les montants en jeu divergent, même s’il évoque jusqu’à 300 000 francs Belges promis par son adversaire pour l’aider.

19ème : Sean Kelly, 62 points

Lorsqu’on pense au coureur Irlandais, viennent en tête ses 7 succès consécutifs dans Paris-Nice ou bien ses 4 maillots verts dans le Tour de France, record de l’époque, seulement battu par Erik Zabel depuis. À cela, on pourrait aussi ajouter une victoire dans la Vuelta et une place de numéro 1 mondial à la fin des années 1984 à 1988. Mais les courses par étapes ne suffisent pas pour avoir ce rang et de nombreuses victoires dans les classiques sont aussi là, au point d’être le premier vainqueur de la Coupe du Monde, en 1989. En 1986, il est remporte son second Paris-Roubaix dans les rues de la ville, devant le siège social de La Redoute, partenaire majeur de l’épreuve, ayant obtenu de ne plus aller dans le vélodrome, même si cela ne durera que 3 ans. Son premier succès avait été acquis 1984, année d’un rare doublé avec Liège-Bastogne-Liège, seulement réalisé avant lui par Rik Van Looy et Eddy Merckx et qu’on n’a plus revu depuis. Malgré 3 places de dauphin, il n’aura jamais remporté le Ronde, seul des 5 monuments manquant à son palmarès. Il aura d’ailleurs cumulé bien plus de places d’honneurs dans les Flandres que de victoires, avec comme unique succès majeur un Gent-Wevelgem.

18ème : Gaston Rebry, 62 points

S’il a surtout été surnommé le « bouledogue » ou la « locomotive », Gaston Rebry a également été le premier coureur appelé « Monsieur Paris-Roubaix », bien avant Roger De Vlaeminck. En effet, le coureur de la fin des années 20 et du début des années 30 y a cumulé 6 places dans le top 5, dont 3 victoires. Il n’est d’ailleurs que le deuxième coureur à s’être imposé 3 fois dans la reine des classiques et en est le seul de l’entre deux guerres. Par ailleurs, il est un des 10 coureurs à avoir réussi le doublé avec le Tour des Flandres. A l’époque, la mode était à l’accourcissement relatif des courses et les demi-étapes commençaient à exister. Ainsi, son Tour des Flandres victorieux faisait moins de 240 kilomètres. Il faisait alors une grande boucle dans les Flandres, autour de Gent, et ne comptait que 3 véritables monts : l’Edelareberg, (aujourd’hui asphalté), le Kruisberg (partiellement), à la sortie d’Oudenaarde et de Ronse, ainsi que la montée de Kwaremont. Cependant, pas de comptabilisation particulière à l’époque, ces chemins étant les routes usuelles entre les différentes villes de cette région. Pas de détour non plus, la nouvelle route très large n’existant pas encore. On ne parlait donc pas de « Vieux » ou de « Nouveau » Kwaremont à cette époque.

17ème : Herman Van Springel, 64 points

Le Belge est le coureur le mieux classé n’ayant gagné ni le Ronde, ni Paris-Roubaix, où il a au mieux terminé à la deuxième place. Il a cependant énormément gagné dans les Flandres, avec notamment Gent-Wevelgem, le Het Volk, la Flèche Brabançonne et le GP E3. Herman Van Springel est plus connu aujourd’hui pour le final dramatique du Tour de France 1968, avec le port du maillot jaune avant la dernière demi-étape contre-la-montre, mais avec deux coureurs à moins de 20″ de lui et un top 9 se tenant en 2’28″. Il faut dire qu’on gérait alors la suite directe du décès tragique de Tom Simpson et la chasse au « doping » commençait, avec un des tours les moins montagneux de l’histoire (seuls 3 cols dignes de la dénomination moderne « hors catégorie »). Dans cette dernière demi-étape, il perdra le Tour de France au profit de Jan Janssen pour 38″, le plus petit écart jusqu’à 1989. Mais à l’époque, ce sont bien les classiques qui ont fait sa légende, avec principalement Bordeaux-Paris, dont il est le recordman de victoires avec 7 succès, dans la course longue de 600 kilomètres, dont plus de la moitié derrière derny. Il aurait même pu en avoir 8, mais en 1967, les coureurs se font surprendre par Georges Van Coningsloo, ne respectant pas la pause officieuse de la nuit, après la première partie de 250 kilomètres sans entraineur et qui s’est ainsi imposé après une échappée solitaire de plus de 350 kilomètres. Une anecdote reprise dans le film « Le Vélo de Ghislain Lambert ».

16ème : Raymond Impanis, 65 points

Coureur de l’après-guerre, il est le quatrième coureur à réaliser le doublé Ronde-Roubaix, en 1954, mais il est le premier à le faire avec une seule semaine d’intervalle entre les deux épreuves (contre deux auparavant). Pour Paris-Roubaix, il a longtemps détenu le record de participations, avec 16. Il aura fallu attendre près d’un demi-siècle pour que Servains Knaven l’égale et quelques unes de plus pour que George Hincapie et Frédéric Guesdon le battent, d’une unité. Sa longue carrière lui a permis de cumuler beaucoup de places d’honneurs dans les classiques flandriennes, où les succès sont plus rares, même s’il s’est imposé deux fois dans Gent-Wevelgem et deux fois dans À travers la Belgique, qui deviendra en 2000 À travers les Flandres, mais qui s’achevait déjà (comme toutes ses éditions) à Waregem. Il a aussi gagné dans les Ardennes, passant tout proche en 1957 de faire un autre doublé, dans le weekend Ardennais, la Flèche Wallonne se déroulant sur un parcours de Charleroi à Liège la veille de Liège-Bastogne-Liège dans les années 1950. S’il a gagné le samedi, il n’a pas sur faire de même le dimanche, allant chercher une de ses 4 places de dauphin dans la doyenne.

15ème : Rik Van Steenbergen, 68 points

Avec 28 ans de carrière et 1053 succès répertoriés sur la route et la piste, Rik Van Steenbergen est tout simplement un des coureurs les plus couvent couronnés dans toute l’histoire du cyclisme. Il est le premier de cette liste à avoir remporté deux fois le Tour des Flandres et deux fois Paris-Roubaix (seuls 5 autres coureurs ont réussi cette performance). Son premier succès dans le Ronde est acquis en 1944, à seulement 19 ans (il en est le plus jeune vainqueur), au bénéfice notamment d’une chute de plusieurs de ses adversaires dans le vélodrome de Gent. Il a également remporté Paris-Bruxelles et le tout premier À travers la Belgique à Waregem. Dans la même localité, il remportera 12 ans plus tard son troisième titre de champion du monde, égalant ainsi le record d’Alfredo Binda, que seuls Eddy Merckx et Oscar Freire également depuis. En plus de cela, il a remporté deux Flèche Wallonne, un Milan-Sanremo et 20 titres de champions de Belgique, la plupart sur piste à la fin de sa carrière, avec notamment l’omnium, dont il a aussi été double champion d’Europe. L’épreuve comptait alors une course aux points, une poursuite individuelle, un kilomètre et une course à élimination, avant d’évoluer au fil des années, avant de devenir une discipline olympique à Londres en 2012.

14ème : François Faber, 70 points

Plus haut coureur d’avant-guerre dans le classement, il est aussi le Luxembourgeois le mieux classé, même s’il est né en France et y passé presque toute sa vie, son choix de nationalité ayant été fait pour éviter un long service militaire et ainsi participer à plus de courses cyclistes. A son palmarès, on liste notamment deux Paris-Tours, un Tour de Lombardie, un Bordeaux-Paris, un Paris-Bruxelles et un Paris-Roubaix, pour évoquer les classiques ayant une signification aujourd’hui, auquel on peut adjoindre l’unique Sedan-Bruxelles en 1909, avec les meilleurs coureurs de l’époque au départ. La même année, il écrase le Tour de France, remportant 5 étapes consécutives, record toujours inégalé depuis, dont une à Metz, alors en territoire Allemand (comme quoi, le Tour de France n’a pas mis longtemps pour sortir du territoire national). Cette année là, sauf une dixième place à Bayonne, il a terminé dans le top 5 de toutes les étapes. La telle domination d’un coureur massif, faisant la différence dans la plaine, entraînera l’ajout de nouveaux cols montagneux l’année suivante, avec le premier passage dans les Pyrénées. Même s’il avait aussi des capacités de grimpeurs, son manque de compétition l’empêchera de jouer la gagne, puisqu’il a passé la majorité de l’hiver à aider la population Parisienne victime de la crue de la Seine. La Première Guerre Mondiale vient stopper sa carrière, alors qu’il n’a que 28 ans. Dès le début du conflit, il s’engage dans la légion étrangère afin de défendre la France, puisque malgré son choix de nationalité, il se sent avant tout Français. Il tombera dans les tranchées de l’Artois au printemps suivant, alors qu’il tentait de venir en aide à un de ses camarades. Son corps ne sera jamais retrouvé.

13ème : Eric Vanderaerden, 71 points

Après une carrière chez les jeunes typiquement flamande (titres nationaux en cyclocross et en omnium), sa carrière professionnelle s’ouvre avant tout par le Tour de France, remportant le prologue dès sa première année, puis s’imposant sur les Champs Élysées l’année suivante, puis remportant le maillot vert encore deux ans plus tard, sans avoir remporté la moindre étape. Dans les Flandres, c’est aussi via une course par étapes qu’il a connu le plus de succès, la aussi via des sprints et du contre-la-montre, même si monts et pavés étaient de la partie, avec 5 victoires dans le classement général des 3 Jours de La Panne. Son palmarès dans les classiques est aussi bien rempli, avec notamment une victoire dans le Tour des Flandres en 1985, en solitaire et sous la pluie, avec le maillot de champion de Belgique sur le dos, après avoir doublé à vélo des coureurs montant le Koppenberg à pied. Deux ans plus tard, c’est le Paris-Roubaix qui sera gagné, là aussi sous la pluie, après une longue poursuite sur le trio de tête, qui ne s’était achevé que dans la ligne droite finale (une des 3 années où la course ne s’était pas achevée au vélodrome), avant de dominer le sprint face à ses compatriotes. Deux grandes victoires acquises après de longs efforts solitaires dans le vent et la pluie, montrant qu’il est un vrai flandrien et bien plus qu’un des meilleurs sprinteurs au monde de l’époque.

12ème : Francesco Moser, 72 points

Meilleur Italien dans ce classement, Francesco Moser a peu gagné dans les Flandres, préférant courir en Italie (où il a gagné le Giro 1984 dans des conditions particulières, mais aussi Milan-Sanremo et deux Tours de Lombardie), ce qui ne l’a pas empêché d’aller gagner Gent-Wevelgem et de terminer deux fois deuxième du Tour des Flandres, à chaque fois battu au sprint. Cependant, Francesco Moser n’est pas vraiment un flandrien dans le sens le plus pur. Ce n’est même pas du tout un coureur « des Flandres ». En revanche, c’est probablement un de meilleurs coureurs « du Nord » de tous les temps, car c’est dans Paris-Roubaix qu’il a obtenu ses plus grands faits de gloire dans les classiques. De 1974 à 1983, il a une place de 13ème, une de 10ème, une de 5ème et 7 podiums, dont 3 victoires ! Et pas 3 victoires étalées sur cette décennie : 3 victoires consécutives. Ce n’était jamais arrivé depuis les années 1910 et ce n’est plus arrivé depuis. Mais là où Octave Lapize avait réglé au sprint des petits groupes, Francesco Moser a fait les choses en grand : 3 victoires en solitaire. La première avec le maillot arc-en-ciel sur le dos en repoussant un trio De Vlaeminck, Raas, Maertens à 1’40″, le second avec « seulement » 40″ sur un autre trio, composé de De Vlaeminck, Kuiper et Zoetemelk, puis le troisième en complète domination. Vêtu du maillot tricolore de champion d’Italie, il domine la course, repoussant son dauphin Gilbert Duclos-Lassalle à 1’48″, le troisième Dietrich Thurau à 3’30″ et le quatrième Bernard Hinault à plus de 6 minutes. Le tout avec une dernière offensive à seulement 15 kilomètres de l’arrivée et après avoir été assisté à une course amateur en nocturne la veille dans les rues de Compiègne.

11ème : Andrei Tchmil, 77 points

Il est, au choix, le premier Russe, le premier Moldave, le premier Ukrainien dans ce classement, ou bien un Belge aux portes du top 10. L’ouverture tardive du monde Soviétique à l’Europe de l’Ouest l’a fait découvrir les flandriennes sur le tard et il n’a commencé à y peser que passé l’âge de 30 ans, ce qui ne l’a pas empêché d’aller remporter le Ronde en 2000 après 3 podiums, de s’impose à Kuurne, à Harelbeke, Waregem, Overijse, mais aussi Tours et Sanremo, pour les principales classiques, jusqu’à une dernière victoire professionnelle en 2002 dans le Limbourg belge, à l’occasion de la renaissance du Tour de Belgique. Autour de cela, il a accumulé de nombreuses places d’honneurs dans les Flandres, ainsi qu’à Paris-Roubaix. La reine des classiques était volontairement esquivée concernant Andrei Tchmil, car c’est son unique succès dans cette épreuve, en 1994, qui va être à présent développée. Il faut dire qu’en dépit de ses diverses nationalités dues aux licences prises après la dislocation de l’URSS, il était chez lui lors de cette course, puisqu’il vivait alors à Roubaix. Ce Paris-Roubaix 1994 est probablement le plus difficile de l’histoire moderne, car si on a retrouvé de la boue en grande quantité en 2001 et une très forte pluie en 2002, les premiers kilomètres en Picardie s’étaient alors courus sous la neige ! Dans l’après-midi, la neige se changeait en pluie, mais le froid était toujours là. La boue recouvrait les pavés glissant et la tranchée d’Arenberg était un massacre pour le peloton, qui ne comptait alors plus que 17 coureurs. Plus loin, dans le secteur de Mons-en-Pévèle, Andrei Tchmil accélérait pour commencer un long raid en solitaire de 62 kilomètres. Johan Museeuw a un temps cru pouvoir revenir, réduisant l’écart à quelques dizaines de mètres sur le pavé d’Ennevelin, mais le Belge s’écroulera ensuite, laissant Andrei Tchmil aller savourer son succès en solitaire sur un vélodrome Roubaisien complètement trempé.

article par Darth-Minardi / Carrefour de l’Arbre

Crédit Photo : Felouch Kotek / http://www.lequipe.fr/Cyclisme-sur-route/Article/Francois-faber-nbsp-nbsp-le-geant-de-colombes-nbsp-est-tombe/53070
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Re: Qui est le meilleur flandrien de tous les temps ? (20 à

Messagepar friton01 » 08 Avr 2017, 12:47

Lorsqu’on pense au coureur Irlandais, viennent en tête ses 7 succès consécutifs dans Paris-Nice ou bien ses 4 maillots verts dans le Tour de France, record de l’époque, seulement battu par Erik Zabel depuis

Petite coquille dans le texte sur Sean Kelly, Peter Sagan a remporté son 5ème maillot vert l'année dernière et battu le record de l'Irlandais.
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