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1ère étape : Porto-Vecchio – Bastia, 213 km

Le 100ème Tour de France s’élance de Corse. Le tenant du titre, Jimmy Engoulevent, n’a pas été retenu par son équipe pour le défendre. Sa succession est ouverte. Le début de l’étape fut calme. Tous les prétendants se jaugeaient et ne voulaient pas se dévoiler trop vite. La course s’est décantée à 15 km de l’arrivée. Johnny Hoogerland tentait de sortir en solo et devenait le premier attaquant de ce Tour. Le peloton explosait ensuite sous le rythme de la poursuite et des contres. Une grosse cassure se produisait à 5 km de l’arrivée, éparpillant les groupes. Malheureusement, l’incident provoqué par le bus Orica-Greenedge aura endommagé le dispositif de chronométrage, réduisant les efforts à néant en forçant les commissaires à classer tout le monde dans le même temps. Après de longues discussions, les commissaires reconstituaient le classement et déclaraient vainqueur, Edward King, devant deux coureurs Cofidis, Le Mével et Mate.

2ème étape : Bastia – Ajaccio, 156 km

Cette deuxième étape offrait un profil vallonné, apte à creuser les premiers écarts et satisfaire des coureurs échaudés par l’incident de la veille. Si les leaders devraient finir dans le même temps, de nombreux prétendants seront déjà éliminés lors de cette journée. Le peloton attendait les premières difficultés pour s’exprimer. D’entrée de jeu, l’équipe Omega-Pharma mit la barre haute. Gert Steegmans et Niki Terpstra emmenaient leur leader Mark Cavendish dans la première échappée du jour. Derrière, l’équipe Argos faisait le forcing pour essorer le peloton. Au sommet du Vizzavona, le groupe Cavendish basculait toujours en tête, mais il ne put résister au retour du peloton dans la descente. Ce fut donc un groupe de 59 hommes qui se présenta pour la victoire. Manœuvrant parfaitement, l’équipe Astana empochait le doublé, Muravyev devançant Bazayev. Geraint Thomas prenait la troisième place et s’emparait de la tête du général, tandis qu’Edward King passait au travers de son sprint. Les écarts se sont creusés aujourd’hui. Le malheureux Jan Bakelants, dernier du jour, pointe déjà à plus de 17 minutes.

3ème étape : Ajaccio – Calvi, 145 km

Les organisateurs du Tour de France mettent les petits plats dans les grands en proposant dès le début de l’épreuve des étapes qui permettent de créer des écarts au classement général. Pour la dernière manche de ce triptyque en terre corse, c’est le tremplin du Col de San Bastiano qui lance les hostilités du jour. Cette première difficulté intervient seulement après quelques kilomètres de course et le kazakh Andrey Kaschekhin en profite pour placer un démarrage fulgurant. Néanmoins, lorsque son directeur sportif vient se placer à sa hauteur pour le tenir au courant des écarts qu’il vient de creuser, il l’informe également que le nouveau boss d’Astana, Alexandre Vinokourov est présent pour assister à l’étape. Fou de joie à l’idée de faire plaisir à son ami  » Vino « , Andrey précipite les retrouvailles et quitte prématurément la course alors qu’il semblait au sommet de son art. On salue l’artiste capable du meilleur comme du pire.

La course continue et il faut attendre la fin du Col de San Martino pour retrouver du mouvement. Tom Veelers de l’équipe Argos-Shimano prouve toute son agilité dans la descente du col et prend tous les risques pour faire le trou. Il y parvient même, un gouffre le séparant des autres coureurs tant son niveau est impressionnant. Mais grâce à sa hargne légendaire, Nacer Bouhanni parvient à revenir dans la Côte de Porto. Même si elle a des intérêts à protéger, Europcar laisse filer la belle échappée.
Les deux hommes prennent rapidement un bel écart et ont désormais la certitude de se disputer la victoire aujourd’hui. Habitué à se débrouiller seul dans un final, Bouhanni ne se fait pas de soucis et compte bien régler le compte du hollandais. Malheureusement, comme à sa mauvaise habitude, Bouhanni ne peut que s’incliner et se fait battre au sprint par Veelers. Grâce à cette attaque prise sur un coup de tête, le français portera tout de même la lanterne rouge.

Demain, c’est un contre-la-montre par équipes qui attend les coureurs et Bouhanni devra se méfier à ne pas trop sucer la roue de ses coéquipiers dans les ronds-points, sait-on jamais, il pourrait avoir la dent dure de laisser s’éteindre bêtement sa lanterne au profit de Veelers.

4ème étape : Nice – Nice (CLME), 25km

Rendez-vous très attendu de ce début de Tour de France, l’épreuve du contre-la-montre par équipes offre souvent une panoplie de choix tactiques aux différents leaders : faut-il privilégier la cohésion d’équipe ou oser l’échappée en solitaire ?

La démonstration de King

A cette question, un coureur va répondre d’entrée en illuminant la Promenade des anglais de son talent. Il s’agit de Ted King, coureur étatsunien de la Cannondale. Bien aidé par un choix intelligent de matériel et une condition optimale, le héros du jour était idéalement mis sur orbite par son équipe après quelques tours de roues seulement. A la moyenne vertigineuse de 46.3 km/h, le huitième du général frappait un grand coup pour le gain de l’étape tout en restant modeste sur sa performance : « D’après mon chrono, je signe 32’24 ». Honnêtement, je ne sais pas d’où sort ce 32’32 » ! » Une honnêteté dont doutent les commissaires de course, puisque devant cette performance suspecte, ils ont décidé de déclasser le pauvre Ted King. Le coureur quitte le Tour dévasté mais aura eu l’honneur de porter la lanterne rouge une journée pour sa première participation.
Losada l’emporte, Veelers reprend la main

C’est donc finalement le discret espagnol Alberto Losada qui remporte cette étape, malgré une équipe Katusha à la peine. Il devance son compatriote Benjamin Noval, qui a mis à contribution ses nombreux supporters sur le bord de la route, et le français Cyril Gautier, qui reprend des couleurs après être souvent apparu à l’arrière ces deux derniers jours. Au classement général, Nacer Bouhanni a craqué devant la superbe performance collective des Argos qui permet à leur leader Tom Veelers de s’emparer de la lanterne rouge. Pour finir, on notera la contre-performance des basques de Euskaltel, habitués à mieux sur cet exercice, ainsi que la mauvaise passe qui continue pour Simon Gerrans et les Orica-GreenEdge, relégués à la dernière place du classement.

5ème étape : Cagnes-sur-Mer – Marseille (228,5km)

Première étape en ligne sur le continent, sur un parcours relativement plat. Quelques difficultés cependant dans le final de cette longue étape, occasion pour les coureurs en forme de passer à l’offensive.

La course est assez calme pendant les 200 premiers kilomètres, le peloton se contentant de contrôler à distance un petit groupe d’échappés dans le massif forestier du Haut Var. Il faut attendre la Côte des Bastides, à 30 kilomètres de l’arrivée, pour voir un groupe d’hommes forts se détacher, au sein duquel on retrouve le leader Tom Veelers. Le rythme très élevé emmené notamment par la formation Europcar rend difficile toute attaque. Néanmoins, dans les premières rampes du Col de la Gineste, l’espoir Romain Sicard profite d’une accalmie pour placer une accélération tranchante. Personne ne semble capable d’y répondre, et le français plonge vers Marseille avec une confortable avance. Victorieux sur la ligne, le coureur d’Euskaltel confirme enfin son talent, et en profite pour se replacer au général. Il est désormais sur le podium, à moins de six minutes de Tom Veelers.

6ème étape : Aix-en-Provence – Montpellier (176,5km)

Premier rendez-vous avec la montagne, sous le froid méditerranéen. Les hommes en forme du moment, comme l’ancien champion de France Nacer Bouhanni, ou le néerlandais Tom Veelers, sont attendus au tournant.

Le coup d’éclat de Bouhanni
Et le leader de la FDJ ne tarde pas à se manifester : tandis que l’espagnol Luis Angel Mate Mardones peine à rentrer dans le peloton après un incident mécanique, Nacer Bouhanni éclabousse de son talent le début de l’étape. Parti dès la terrible ascension du Col de la Vayède, un des sommets de ce Tour, il prend rapidement plusieurs minutes d’avance sur un peloton abasourdi. Le vieux briscard avait confié qu’il se sentait particulièrement en forme ces derniers jours : « je n’ai jamais aussi bien mangé, et mon transit est excellent » nous confiait-il ce matin. Quelques kilomètres plus loin, c’est au tour de Frederik Kessiakof d’accélérer le rythme ; il reste toutefois à distance raisonnable du grimpeur français.

Scandale dans le peloton
Mais cette performance n’est pas du goût de tout le monde. Dans la voiture des commissaires, on discute avec sérieux. Les visages se tendent. Car Nacer Bouhanni engrange les minutes d’avance avec une facilité déconcertante. Dérangeante. La suspicion monte, jusqu’à la décision qui fait tout basculer : au kilomètre 86, Nacer Bouhanni, peut-être en passe de remporter le Tour de France, est sommé de s’arrêter, mis hors course. Tollé général dans le peloton : Kessiakoff, ex-futur dauphin de la course, quitte la course « par solidarité avec Nacer, et face à une attitude odieuse de la part de la direction de course ».

La réaction d’orgueil d’Astana
En signe de protestation, les coureurs semblent s’arrêter de pédaler. On a rarement vu un peloton avaler si lentement des descentes de cols. Une ballade que viennent perturber trois coureurs de la formation Astana, mécontents du sort de leur coéquipier : Janez Brajkovic en tête, suivi du vétéran Alexey Lutsenko et de Dmitriy Muravyev. Panique au sein du peloton, secoué par de nombreuses attaques. Sans surprise, les sprinters Cavendish, Greipel, Sagan et consort sont les premiers lâchés. Plus étonnant, le leader de la course, Tom Veelers, montre quelques signes de faiblesse. Il s’accroche, et peut profiter du retard accumulé par Lutsenko et Brajkovic pour sauver de justesse sa lanterne rouge. A l’arrivée à Montpellier, au terme d’une étape dantesque, on assiste donc à un triplé Astana, Lutsenko et Bajkovic terminant main dans la main, laissant leur coéquipier Muravyev et leurs adversaires à plus de 3 minutes. Un chef-d’œuvre qui replace Muravyev dans la quête du Graal.

7eme étape : Montpellier – Albi, 205.5km

Astana dynamite la course

Rien n’est jamais acquis dans le Tour de France et quand certaines formations décident de faire le ménage dans l’optique du classement général, d’autres équipes viennent collaborer pour divers intérêts comme pour la victoire d’étape. C’est à l’initiative d’Astana et de son leader Dmitriy Muravyev que la course bascule dans le Col des 13 Vents, un col qui paraissait anodin aux premiers abords mais qui s’avère déterminant dans le scénario de cette septième étape. Voulant piéger le solide leader du général Tom Veelers, Astana embraye et fait exploser le peloton en deux mais le hollandais s’accroche aux roues et bascule grâce à l’aide de sa formation. Les Lampre et Orica – GreenEdge viennent donner un coup de main aux hommes de Muravyev mais tous les favoris à la victoire finale sont bien à l’avant, on roule désormais pour le bouquet du vainqueur du jour.

Lampre et Orica emmènent le sprint

En surnombre, Lampre et Orica continuent sur cette bonne lancée en espérant une première victoire sur les routes françaises et le duel dans les derniers kilomètres fait rage, chacune des deux équipes souhaitant prendre l’avantage sur l’autre. A la flamme rouge, Orica place merveilleusement bien son leader du jour Meyer mais les Lampre débordent aux cinq-cents mètres grâce à la sagesse de Roberto Ferrari. Ce dernier emmène à la perfection Cimolai qui n’a plus qu’à lever les bras sur la ligne, décrochant ainsi une victoire bien méritée. Ferrari conserve sa deuxième position, devançant les deux Orica qui s’avouent très déçus à l’arrivée.
Au général, le vaillant Tom Veelers enfile un nouveau maillot de leader qu’il devra défendre demain dans la première étape de montagne.

8ème étape : Castres – Ax-3-Domaines, 195km

Rohann Dennis vole vers la victoire

Même si la hiérarchie semble déjà être établie depuis quelques jours, celle-ci pourrait connaître des modifications puisque les coureurs ont aujourd’hui rendez-vous avec la première étape de montagne. Au menu de cette journée pyrénéenne, le Col de Pailhères, premier col hors-catégorie de ce Tour de France, puis la montée finale vers Ax 3 Domaines.

Mais avant d’en arriver là, il faut parcourir plus de cent-quarante kilomètres sans difficultés mais c’est seulement en apparence car la chaleur se fait étouffante pour certains et décourage les baroudeurs à se lancer à l’aventure. Le peloton lézarde au soleil, ce qui n’est plus au goût de Rohan Dennis qui se rebelle et place sa banderille dès le pied du Col de Pailhères. L’australien voltige sur les pentes raides et creuse rapidement un bel écart.

Veelers, taille patron

Derrière, l’Argos-Shimano contrôle tranquillement la course et impose un petit tempo, fatal à quelques coureurs mais facilement gérable pour les favoris. Les hollandais cadenassent la course et préparent magnifiquement le terrain pour mettre sur orbite Veelers dans l’ultime montée vers Ax 3 Domaines. Mais malgré les attaques incessantes de Dmitriy Murayvev, le leader du classement général n’est pas inquiété et franchit la ligne avec le groupe des favoris. Hormis Rohan Dennis qui fait régner un léger parfum de suspicion suite à sa démonstration pour remporter la victoire d’étape, la journée fut plutôt calme et décevante pour la première rencontre entre les coureurs et les hauts sommets. Rien d’inquiétant tout de même quand on sait que généralement ce premier test sert de round d’observation pour les favoris. Demain, ils ne pourront plus se cacher avec pas moins de cinq cols qui les attendent.

9ème étape : Saint-Girons – Bagnères-de-Bigorre, 168,5km

Un leader esseulé

Pour cette deuxième étape traversant le massif des Pyrénées, cinq cols majeurs sont proposés aux courageux de cette centième Grande Boucle. Ce qui pourrait permettre aux leaders de faire la différence et d’offrir un spectacle à la hauteur du tracé du jour. Face à l’hégémonie de la formation Argos-Shimano, plusieurs équipes s’allient et attaquent ensemble dès la première difficulté afin de mettre à mal le leader, Tom Veelers. Cette alliance de circonstance a eu le mérite au moins de faire le ménage autour du hollandais, seul Koen De Kort reste aux côtés de son leader. Face à cette situation, peu habitué à briller sur les routes de ce Tour, les Sky voient là une occasion de se distinguer et roulent pour la victoire d’étape. Les anglais imposent un rythme effréné et empêchent dans les cols qui suivent les tentatives des baroudeurs.

Bazayev rafle la mise

Néanmoins si personne ne peut sortir, les Sky se fatiguent et se loupent complètement, laissant ainsi un regroupement possible dans la descente menant les coureurs à l’arrivée. Les favoris n’ont donc pas pu s’expliquer, au contraire des bons finisseurs qui en profitent pour se disputer la victoire du jour. Muravyev, le leader d’Astana, mène en personne son coéquipier Bazayev dans la dernière ligne droite et ce dernier ne déçoit pas, il s’impose facilement dans cette étape de montagne, victoire assez inattendue pour le kazakh.
Les coureurs vont désormais prendre l’avion pour se diriger du côté de Saint-Nazaire où de nouvelles aventures les attendent pour les jours à venir. Toujours leader au général, Veelers peut voir venir encore sur cette deuxième semaine où seul le vent pourrait venir se mettre en travers de sa route.

Classement du jour :

1/ Assan Bazayev (AST)
2/ Gorka Izaguirre (EUS) m.t.
3/ Samuel Dumoulin (ALM) m.t.
4/ Dmitriy Muravyev (AST) m.t.
5/ Ramunas Navardauskas (GRS) m.t.
6/ Rudy Molard (COF) m.t.
7/ Jean-Marc Marino (SAU) m.t.
8/ Jérôme Pineau (OPQ) m.t.
9/ Ruben Perez (EUS) m.t.
10/ Juan Lobato (EUS) m.t.

Classement général à l’issue de la 9ème étape :

1/ Tom Veelers ( ARG )
2/ Dmitriy Muravyev (AST) + 37’’
3/ Assan Bazayev (AST) + 3’29’’
4/ Kris Boeckmans (VCD) + 3’30’’
5/ Jérôme Cousin ( EUC ) + 4’10’’
6/ Lieuwe Westra (VCD) + 6’12’’
7/ Koen DeKort (ARG) + 6’48’’
8/ Yohann Gene (EUC) + 6’50’’
9/ Geraint Thomas (SKY) + 6’52’’
10/ Sven Tuft (OGE) + 6’53’’

Par CSC_3187, Guame, Svam, Native ; photo Photo Laurent Brun, via sa galerie Flickr.

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