En fonction du pays et des stars à mettre en valeur, les organisateurs choisissent de privilégier tel ou tel type de coureur. Cette année de nombreux championnats présentent ainsi un profil plat que quelques bosses plus ou moins longues, pentues ou proches de l’arrivée doivent animer. C’est par exemple le cas au Danemark où une offensive de Fuglsang et Alex Rasmussen menace longtemps la tenue du sprint. Cependant les coéquipiers de Sebastian Lander sont parfaitement unis autour de leur sprinter, qui reprend finalement le grimpeur de la Trek dans les deux derniers kms. Il lève facilement les bras devant son encore plus jeune lanceur, A.Kragh Andersen, et le vainqueur sortant Matti Breschel.
En France, c’est Steve Chainel qui s’est illustré sur le circuit autour de Compiègne. Sorti à deux tours de l’arrivée, il s’incline lui aussi dans les trois derniers kms. Ceux-ci présentent deux fois mille mètres de faux plat entrecoupés par un autre km plus sévère autour des 7%. Les sprinters démarrent pourtant dans ces pentes, Petit et Bouhanni en tête. Les deux se sont vus trop présomptueux et craquent dans la ligne droite finale où Démare, Coquard et Pinaud les débordent. Le sprinter Etixx semble partir vers la victoire mais, comme à Lannilis il y a deux ans, Tony Gallopin effectue un retour canon. L’unique représentant des Lotto Jumbo jette son vélo sur la ligne, mais il échoue cette fois d’un rien. Il est second, comme l’an dernier. Arnaud Démare peut laisser éclater sa joie. Après le maillot jaune en 2013, il garnit sa collection de maillots distinctifs.
Chez les belges, les équipes TopSport et Etixx ont étouffé les offensives en vue de leurs sprinters Van Staeyen et Boonen. L’affaire semblait maitrisée lorsque Gilbert est parti dans un très long sprint, surprenant les troupes fatiguées. Van Staeyen ne pourra jamais revenir et se contente d’une place sur le podium. En revanche Kevyn Ista a bien senti le coup. Seul à avoir suivi Gilbert, le coureur Southeast n’a eu qu’à aligner son poisson-pilote improvisé dans les derniers mètres.
Le sprint a en revanche été évité sur les bords du Rhin. Le championnat allemand présente une côte plus longue d’environ 7 kms à répéter huit fois. Comme lors des dernières éditions, revenir sur l’échappée ne semble pas une priorité pour les équipes de sprinters, qui attendent les deux derniers tours et une offensive de Martens pour mettre la machine en route. Dans le final de la dernière bosse, Tony Martin sort Wegmann et Martens de sa roue pour se lancer à la poursuite de l’homme de tête. Cette longue descente ne lui est pas si favorable car Mamos résiste plus que bien, au contraire d’un peloton qui perd irrémédiablement du terrain. Le Panzer fait parler ses qualités de rouleur dans les tous derniers kms, il revient finalement à 500 mètres du but. Le jour de gloire de Mamos, dix ans de carrière dans l’anonymat du peloton, est passé près. Martin confirme lui sa démonstration du chrono et semble au top de sa forme en vue du Tour.
Enfin en Espagne, les Lotto Jumbo ont animé la course par Intxausti dans l’échappée matinale, puis Barredo dans les derniers tours. Les Movistar ont cependant maté ces tentatives pour favoriser le doublé de Rojas. Au sommet de la dernière bosse à 5 kms du but, Luis León Sánchez joue son va-tout en sortant dans ce long faux-plat descendant jusqu’à la ligne. Les forces Movistar commençant à manquer, Sánchez creuse l’écart jusqu’à la ligne. Il a le temps de saluer la foule, comme Martin il double contre-la-montre et épreuve en ligne. Un doublé que réalise aussi Michal Kwiatkowski alors que Cancellara en est privé par Albasini, là aussi au terme de sprints massifs.
Certaines épreuves présentaient toutefois plus de relief. Cela n’a pas empêché Boasson Hagen d’y aller lui aussi de son doublé, une habitude pour le coureur Etixx. En Italie, un autre coureur Etixx faisait figure de favori, et pas des moindres. Nibali a pourtant dû s’isoler de ses équipiers dans les trois derniers tours où il s’est retrouvé seul face à une dizaine d’adversaires pas tous enclins à collaborer avec lui. Ulissi en a profité pour s’échapper dans la dernière ascension pour s’imposer en solitaire à Rovereto. 25 secondes plus tard, Sella règle un Nibali dépité dans un sprint à deux. Le maillot tricolore lui échappe encore, mais le Requin de Messine a en tout cas prouvé sa bonne forme à quelques jours du Tour.
De l’autre côté de l’Atlantique, les colombiens et américains pouvaient s’exprimer sur un terrain bien plus escarpé. L’armada Sky menée par Henao, Uran et Chaves, ainsi que Betancur et Atapuma pour citer d’autres favoris, n’ont pourtant placé aucun des leurs dans le top 10. La formation anglaise n’a bizarrement pas profité de sa supériorité numérique, préférant un enterrement de première classe pendant que Chalapud s’envolait vers le titre. Plus haut, dans les environs de Los Angeles, les favoris van Garderen et Talansky n’ont pas non plus pris leurs responsabilité. L’écrémage a commencé à se faire au train dans la montée finale pour laisser un groupe de huit se disputer la victoire au sprint. Le tenant du titre, Alex Howes, joue cette fois l’équipier modèle pour Busche qui punit les attentistes.
Enfin deux courses originales proposaient des pavés dans deux configurations différentes. À Lincoln, les organisateurs ont dégotté un mur pavé où ils ont tracé la ligne au sommet du 17e franchissement. Les spécialistes britanniques des flandriennes ne sont pourtant pas nombreux. Geraint Thomas est donc le favori et l’équipe Sky restera solidement autour de lui toute la course. Au point, vers la mi-course, de se trouver brièvement dans une échappée de neuf comprenant les huit Sky, plus Hathaway ! Mais comme en Colombie, ils ne profitent pas de leur supériorité pour mettre en difficulté leurs adversaires. C’est même le sprinter Hathaway qui grimpe systématiquement en tête la seule difficulté dans les 60 derniers kms. Les relances au sommet fatiguent petit à petit ses adversaires, jusqu’au moment où le gallois attaque au passage de la cloche. Ce qu’il reste du peloton explose aussitôt. Thomas se rend compte que ses équipiers ne lui sont plus d’aucune utilité et se lance à la poursuite de son compatriote. Il finit par revenir à 3 kms du but, trop tard pour récupérer. Hathaway le dépose dans le dernier mur pour décrocher son premier titre national, devant pas moins de six coureurs Sky ! Assez proche du duo de tête, Chris Froome fait un bon 3e sur ce parcours inadapté à ses caractéristiques.
Enfin aux Pays-Bas, il n’y avait pas de relief mais les trois secteurs pavés du circuit étaient un peu plus défoncés et surtout les spécialistes plus nombreux. Langeveld, Terpstra, Boom et Maaskant s’en sont notamment donné à cœur joie, attaquant sans cesse et se roulant les uns sur les autres dans la dernière heure de course. Les deux compères de la Lotto Jumbo ne semblaient pourtant pas décidés à se disputer la victoire à quatre puisqu’ils ont tout fait pour favoriser une arrivée groupée dans le dernier tour. La mission fut réussie car un groupe d’une quinzaine de coureurs s’est présenté devant le dernier secteur pavé à trois kms du but. Lars Boom y a une dernière fois fait le forcing, plaçant Leezer dans une position idéale. Au chaud depuis le départ, le sprinter n’eut qu’à aligner au sprint ses compagnons entamés pour décrocher la plus belle victoire de sa carrière. Dans l’ombre du collectif, Leezer est cependant un coureur solide qui s’est par exemple illustré lors de sa double deuxième place sur le Het Nieuwsblad et Kuurne-Brussels-Kuurne en 2014, et s’est mis en évidence sur le GP E3 et Gent-Wevelgem en début d’année.
Les résultats :