Bernaudeau assume
PHILIPPE BRUNEL
LE MANAGER DE DIRECT ÉNERGIE A OFFICIALISÉ HIER SA DÉCISION DE NE PAS SÉLECTIONNER BRYAN COQUARD POUR LE TOUR. À SES YEUX, IL N'OFFRE PLUS SUFFISAMENT DE GARANTIES.
Il fallait s'y attendre : Bryan Coquard ne disputera pas le Tour de France qui s'élance samedi de Düsseldorf en Allemagne. Son nom ne figure pas dans la liste des neuf coureurs sélectionnés par le manager de Direct Énergie, Jean-René Bernaudeau. «Je dirige une équipe qui doit se projeter dans l'avenir et ne peut se permettre d'investir sur un leader qui n'offre plus suffisamment de garanties», assène-t-il.
Par ce choix, ce rejet, le Vendéen entérine la fin de son idylle avec Bryan Coquard qu'il avait promu leader de sa formation en 2016. À l'époque, il ne tarissait pas d'éloges à propos de ce jeune sprinteur, aujourd'hui âgé de vingt-cinq ans, talentueux, couvé, adoubé par Thomas Voeckler. Un coureur ambitieux, déçu en mars dernier de ne pouvoir participer à Milan-San Remo, classique World Tour où les Direct Énergie, équipe de Deuxième Division, n'avaient pas été invités par l'organisateur. «J'avais compris sa frustration, du reste très légitime, notre sponsor en avait d'ailleurs pris acte.».
Dès janvier, Bernaudeau et Coquard avaient évoqué l'avenir, un avenir commun, lors d'un stage en Espagne. « Bryan avait plaidé pour une réévaluation salariale de ses deux équipiers Angelo Tulik et Adrien Petit, c'était tout à son honneur », rappelle le manager qui avait satisfait les exigences de son leader.
Mais en mars, lorsqu'il se rend en Belgique, contrats en poche, Coquard tergiverse. Des équipes du World Tour le sollicitent. Il réclame un délai et promet de donner sa réponse, après l'Amstel Gold Race (le 16 avril), où il s'était classé 4e en 2016, mais qu'il n'a pas fini cette année. Très vite, leurs relations s'enlisent et se dégradent. Coquard suggère dans la presse que « si les gens l'apprécient au sein de son équipe, c'est parce que grâce à lui, ils ont du travail».
Des propos désobligeants, mal perçus par Bernaudeau, d'autant que sur la route, ce n'est plus ça. Coquard ne gagne plus. Plus comme avant. Fait-il bien son métier ? Pèche-t-il par manque d'humilité ? Fait aggravant, Bernaudeau apprend par un tiers, et ce sera l'élément déclencheur du conflit, « qu'un agent français est allé proposer les services de Coquard pour la saison prochaine, au patron de la formation Fortuneo», équipe Continental pro (comme Direct Énergie) qui, soit dit en passant, n'est jamais invitée à Milan-SanRemo.
Tous ces faits avaient fini par creuser le malaise et des dissentiments très palpables dimanche au Championnat de France, où Bernaudeau, quelque peu dépité, avait pris soin de rappeler à ses coureurs, lors du briefing, « qu'aucun d'eux ne devait sa présence dans les pelotons à Coquard».
Et ce dernier avait reçu pour mission de ne pas quitter la roue d'Arnaud Démare dans l'espoir de « profiter d'une éventuelle erreur du sprinteur de la FDJ ».
Hier, donc, la sentence est tombée. Et la rupture consommée avec cette non- sélection pour le Tour. « Je le regrette, Coquard est un charmant garçon, il le reste mais il est moins fort, moins explosif que l'an dernier, il doit l'admettre et comprendre aussi, que je porte le costume d'un patron qui a des comptes à rendre», argumente Bernaudeau qui dans le Tour renverra ses coureurs à cette « culture de la gagne » héritée de Thomas Voeckler, (dont c'est le dernier Tour), le capitaine emblématique d'une formation cette année articulée autour de Thomas Boudat et Lilian Calmejane. Une formation qui, au tournant des années 2000, avait par son panache, son allant, participé à restaurer l'image du cyclisme français, en pleine rédemption après l'affaire Festina. '
L'Équipe - mardi 27 juin 2017